DE
HORS

Carnets de chantier 2013

 CH 2014

« La lisière habitée »

Inscrite dans le programme de gestion différenciée du site, la recréation d’une lisière, zone intermédiaire entre les deux milieux que sont la forêt et la prairie, est indispensable pour le maintien d’un écosystème équilibré. Le projet du Laboratoire du Dehors concerne les lisières situées en face du Château. De l’allée des Antilopes à l’allée du Bois, l’intervention s’étend sur approximativement 380 mètres. Les lisières en question sont les plus visibles depuis le Château. Dans le plan de gestion forestière 2010-2021 elles sont intégrées dans la parcelle 3, définie comme « une chênaie mixte de fond de vallon sur matériaux drainés, peu acide, assez riche en éléments minéraux ». Son peuplement forestier est une jeune futaie composée en majorité de frênes et d’érables. Le travail a commencé par la lisière ouest, de l’allée des Antilopes à l’allée des Cavaliers. La lisière ouest jouxte une forêt diversifiée et riche en végétaux et accidents de terrains, ainsi qu’une mare et un ancien « fer à cheval ». Nous décidons de nommer cet espace jardiné « la lisière habitée ».

Plan de plan Chamarande tapis forestier

Notre intervention a commencé en avril 2013, après le passage des conseilleurs de l’ONF qui avaient décidé quels arbres, parmi ceux composant la première ligne de la forêt, seraient abattus pour commencer à y recréer une lisière. Une entreprise extérieure au Domaine avait réalisé le chantier d’abattage. À notre arrivée nous avons donc trouvé, déposés au sol, tous les arbres coupés, les souches restant visibles à quelques centimètres du sol. Les gros diamètres étaient plus au moins redécoupés dans différentes longueurs, le bois raméal était laissé en état sur le sol. L’espace ainsi dégagé faisait penser à un « salon de verdure » avec des massifs d’arbustes persistants de buis (Buxus sempervirens) et de lauriers-cerises (Prunus laurocerasus).

Deux arbustes datant d’époques différentes et renvoyant à des modes de jardinage aussi très différents. Des arbustes qui, aussi et chacun à sa manière, sont l’objet de préjugés sociaux : bien à sa place et honorable pour le buis, déplacé et démodé pour le laurier-cerise. Originaire d’Europe du sud et d’Asie mineure, le laurier-cerise a commencé à se répandre en dehors des jardins et à proximité des habitations il y a une vingtaine d’années. Massivement planté par l’homme, l’espèce se ressème ensuite rapidement par ornithochorie (dispersion des graines par les oiseaux). Les pouvoirs publics en Suisse, en Angleterre et en Amérique du nord ont débuté une surveillance et des campagnes d’information sur cet arbuste qui « colonise les forêts et qui, par son ombrage, nuit au développement des végétaux locaux ». Nous pensons que les lauriers-cerises sont les témoins des différentes transformations du site à travers le temps, au même titre que les buis, qui eux datent probablement d’un ancien « salon de verdure » du XVIIIe siècle. Ces lauriers dominent le centre de l’espace au fond du salon de verdure ; les buis se trouvent, eux, en bordure de lisière, plus à la lumière.

Nous avons entrepris de fabriquer une grande table centrale, qui sera un élément essentiel dans notre « salon ». Nous nous sommes servis de tous les troncs de diamètre important pour la construire. Ils ont été enterrés de quelques dizaines de centimètres pour pouvoir rester debout placés à la verticale.

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Le plus gros arbre abattu, un vieux chêne, impossible à bouger sans le découper, nous a servi pour délimiter notre scène. Nous n’avions pas, en tout cas la première année, l’envie de le découper, tellement sa présence au sol avec la souche à proximité reste un bon témoin de l’action qui a été réalisée.

Toutes les autres découpes des bois ont été classées par taille et disposées de façon à délimiter la salon de verdure. Un pont a été construit pour franchir le fossé entre la nouvelle lisière et la grande prairie.

Une mare, se trouvant à proximité, était bordée d’anciennes découpes forestières en désordre, donnant un aspect repoussant à cet endroit. Ce « désordre » a été confié à Adrien Biewers dans le cadre de son diplôme en paysage. Adrien Biewers voulait étayer sa thèse sur la naturalité dans les jeux pour enfants.

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‹ La mare aux 401 ronds de bois ›
Agencement de billes de bois rondes ; érables, chênes, noisetiers, frênes, bouleaux.
Lors du curage de la mare en 2009, de nombreux rondins de bois ont été laissés au sol de façon aléatoire pour permettre la nidification des tritons. Mais cet agencement dispersé limitait toute déambulation. Les structures en bois ont alors été assemblées sans aucune fixation, le poids de chaque élément auto-bloque l’ensemble. Nous vous invitons à tester cet espace comme bon vous semble : une table, une assise, un parcours de déambulation, un muret à escalader ou encore un lieu de curiosité de la faune. Cette réalisation tend à démontrer que l’on peut trouver des espaces ludiques loin des standards que nous rencontrons au quotidien.

Pour la fin du premier chantier des miradors de chasse ont été placés tout le long de la lisière à des intervalles réguliers avec des tables et des parasols. À la fois accueillants et au service du public, ils permettent de regarder plus loin, ailleurs. Cet ensemble fonctionne comme une signalétique forte pour annoncer le début d’un changement en cours.

 

 5 09 2013 Chamarande

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